Château d'Époisses

Époisses et la marquise de Sévigné

Époisses et la marquise de Sévigné

Les relations entre la Marquise de Sévigné et les Guitaut remontent aux années 1670, peut-être même avant. Ils étaient voisins à Paris et en février 1671, elle racontait à sa fille, Madame de Grignan, l’incendie de l’hôtel Guitaut, en pleine nuit : comment tout le monde s’était retrouvé en petite tenue dans la rue et comment elle avait tenté de les aider.

Mais c’est surtout à Bourbilly et à Epoisses que les amis se rencontraient. En octobre 1673, venant de Grignan, Mme de Sévigné arrive à Bourbilly. Le lendemain matin, un cavalier arrive à Bourbilly sous une pluie battante “mouillé comme un canard”. C’est Guillaume de Guitaut qui vient la surprendre. “Nous causâmes extrêmement… Un carrosse à six chevaux entre dans la cour et Guitaut à pâmer de rire. Je vois en même temps la comtesse de Fiesque et Mme de Guitaut qui m’embrassent”. Trois jours après cette visite impromptue, Mme de Sévigné, ayant terminé ses affaires, vient rejoindre ses amis à Epoisses : “Cette maison est d’une grandeur et d’une beauté surprenante. M. de Guitaut se divertit fort à la faire ajuster et y dépense bien de l’argent… Nous avons causé à l’infini le maître du logis et moi, c’est-à-dire j’ai eu le mérite de savoir bien écouter. On passerait bien des jours dans cette maison sans s’ennuyer “.

Le 21 août 1677, Mme de Sévigné écrit d’Epoisses à Mme de Grignan : “Nous arrivâmes ici hier au soir à deux heures de nuit. Nous pensâmes verser mille fois dans les ravines, que nous eussions fort aisément évitées si nous eussions eu seulement une petite bougie dans un petit bougeoir, mais c’est une belle chose de ne voir ni ciel, ni terre. Enfin nous envoyâmes ici au secours, ici où nous arrivâmes comme le maître du logis allait se mettre au lit. […] Vous connaissez le maître et le bon air et le bon esprit qu’il a pour ceux qu’il aime un peu ; il m’assure que je suis de ce nombre et je le crois par l’amitié qu’il a pour vous. […] Nos conversations sont infinies, il aime à causer et quand on me met à causer, je ne fais pas trop mal aussi, de sorte qu’on ne peut pas être mieux ensemble que nous y sommes”.

Pour clore ce séjour si agréable, Guillaume de Guitaut décide d’accompagner Mme de Sévigné et son oncle Coulanges “le Bien Bon” jusqu’à Saulieu. Ensemble ils écrivent à Mme de Grignan.

Mme de Sévigné commence : “Enfin, j’ai quitté Epoisses mais je n’ai pas quitté encore le maître de ce beau château. Il est venu me conduire jusqu’ici. Il n’y a rien de si aisé que de l’aimer, vous le connaissez”.

Guitaut prend la plume : “Enfin nous nous séparons demain […]. Je n’ai pu me résoudre à ne pas coucher encore cette nuit avec elle et la suis venu accompagner jusqu’au premier gîte. Enfin, encore une fois nous nous quittons à regret, ce me semble”.

Mme de Sévigné la lui reprend : “Il est très sage, cet homme-ci. Cependant je lui disais tantôt, le voyant éveillé comme une potée de souris : “Mon pauvre Monsieur, il est encore bien matin pour se coucher, vous êtes encore bien vert, mon ami, il y a bien du vieil homme, c’est-à-dire du jeune en vous”.

Guitaut se moque gentiment d’elle : “Vous ne ferez jamais taire Madame votre mère… je finis par là en vous assurant pourtant qu’à l’heure qu’il est, votre bonne Maman est entre deux vins. Adieu l’eau de Vichy, je ne crois pas, si elle continue, qu’elle doive y aller, ce serait de l’argent perdu”.

Mme de Sévigné se défend : “C’est lui qui en a trop pris ; pour moi, j’en ai pris aussi. Ils sont si longtemps à table que par contenance, on boit, et on boit encore et on se trouve avec une gaieté extraordinaire”.

Guitaut conclut sagement : “Après toutes nos folies, tout compté et tout rabattu, je m’en vais coucher avec le Bien Bon”.

En 1680, Mme de Sévigné a appris la naissance d’un garçon chez les Guitaut : “Enfin, Monsieur, vous avez un garçon ; gardez-le bien car vous n’en faites pas quand vous voulez. […] mais que disent toutes les petites poulettes d’avoir ce petit coq à leur tête ? Il me semble que je les vois toutes briller autour de lui”.

Il y eut encore de nombreux échanges de lettres entre ces vieux amis. Après la mort de Guillaume, Mme de Sévigné continua ses bonnes relations avec la femme de celui-ci. Elle lui demandait de surveiller la gérance de Bourbilly, où elle ne se rendait plus, et Mme de Guitaut n’y manqua pas jusqu’à la mort de la Marquise en 1696.